Blogue Jean-Sébastien Légaré | À cette question, je ne répondrai…

Le sommet du classement mondial est le théâtre d’une belle bataille à trois joueurs depuis quelques semaines. Scottie Scheffler vient de reprendre la position de commande devant Jon Rahm et Rory McIlroy. Bien souvent, les journalistes y vont d’une question relativement simple en ce sens : est-ce que tu es le meilleur golfeur au monde ? De grâce, usez de compétences relationnistes et détournez la question au lieu d’y répondre concrètement!
Jean-Sébastien Légaré | Au19e.ca
Rédacteur en chef
L’élément de confiance en soi est un incontournable si vous voulez réussir, peu importe le domaine. Dans le sport et au golf spécifiquement, on a l’impression qu’elle peut toujours basculer d’un côté comme de l’autre.
Elle est aussi souvent questionnée. Chaque golfeur qui évolue sur les plus importants circuits professionnels ont une confiance à rude épreuve. Cependant, le golf a cette façon de rééquilibrer les éléments lorsqu’un être humain croit détenir toutes les solutions de ce jeu insaisissable.
La question est simple. Le piège est grand. Les répercussions sont difficiles à prédire. « Est-ce que tu sens que tu es le meilleur golfeur présentement ? »
C’est à ce genre de question que Rory McIlroy a répondu à la veille de l’Omnium WM de Phoenix. Une carte de 73 a suivi le lendemain. Depuis, le Nord-Irlandais a de la difficulté à compiler quatre bonnes rondes consécutives. Il n’a même pas fait partie des festivités du weekend au Championnat des joueurs du circuit de la PGA. Coïncidence ? Probablement. Mais le retour à la réalité a été brusque.
Quelques semaines plus tard, un membre des médias s’est essayé avec une question du même style à l’endroit de Jon Rahm. « Quand tu joues ton meilleur golf, est-ce que quelqu’un peut te battre ? » L’Espagnol a répondu un « non » catégorique.
Mais pourquoi diable répondre franchement à cette question ? D’abord et avant tout, quel est le but de cette question ? Que cherche-t-on à savoir ?
Ce sont les meilleurs de leur profession. Lorsqu’ils sont au meilleur de leur art, c’est certain qu’ils semblent invincibles.
Bref, ce n’est qu’une épineuse demande qui ne fait qu’offrir aux autres golfeurs une motivation intrinsèque supplémentaire.
Laissez parler le respect
Tiger Woods a toujours été un maître en ce qui a trait d’abaisser les attentes externes et médiatiques, même si, au fond de lui-même, il savait qu’il n’y avait que lui qui pouvait gagner. Le respect qu’il avait envers le talent des autres golfeurs devant les médias a toujours été impeccable. Rappelez-vous en 2006, lorsque le Canadien Stephen Ames l’avait piqué au vif avec des commentaires qui mettaient en doute la précision de son jeu. Tiger avait répliqué par son talent. Ces commentaires d’après-match à la télé avaient été respectueux malgré la dégelée de 9-et-8 en match-play. Voilà un simple exemple au passage…
Personnellement, je suis toujours étonné de voir un golfeur tomber, en quelque sorte, dans le piège et laisser sa véritable nature répondre à la question. À ce niveau, c’est tout à fait normal de croire que l’on est le meilleur. Il le faut ! Sinon, on s’appelle Joel Dahmen et on gagne tout de même très bien sa vie!
Blague à part, de retour au sommet de l’échiquier mondial, Scottie Scheffler est, selon moi, celui qui usera de finesse pour détourner la question… si on lui la pose. Enfin, je l’espère! Le contraire surprendrait dû à sa nature très terre-à-terre et parce qu’il répond souvent de la même façon. C’est redondant pour les journalistes, mais ça permet de ne pas outiller davantage ses plus proches poursuivants. Est-il le meilleur golfeur actuellement ? Certes! Mais il dira autre chose afin qu’il puisse garder les dieux du golf…de son côté!